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Μάζης Ιωάννης: Άρθο για τον επιδιωκόμενο από την Τουρκία νέο γεωπολιτικό ρόλο (Προφητική αναφορά για το τζιχαντιστικό χτύπημα στο Charlie Hebdo στις 7 January 2015)

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mazisLa Turquie à la recherche d’un rôle

Par Ioannis Th. Mazis

Docteur d’État en géographie à l’Université nationale et capodistrienne d’Athènes

[première publication: Institut Jean Lecanuet[1]-France Forum, Décembre 2014, nouvelle serie, «Le sport gouverne-t-il le monde?», N° 56, 75-76, Paris, France]

Ou quand la Sublime porte voit s’éloigner de plus en plus celle pour entrer dans l’Union européenne !

La direction politique turque Davoutoglou-Erdogan (dans cet ordre hiérarchique) perçoit, à long terme, la diminution de l’importance stratégique de la Turquie pour l’Occident et l’Otan. Ce phénomène est dû à la fonte des glaces dans le passage du Nord-Est (détroit de Béring) qui permettra, dans quelques années, à la Russie d’atteindre les points stratégiques de l’océan Indien en trois fois moins de temps que les Américains. Ce fait, signe des temps, réduit l’importance du rôle de la Turquie – et de la Grèce – dans l’endiguement de l’accès de la Russie aux eaux chaudes de la Méditerranée et limite donc dans une large mesure l’intérêt de cette aile sud-est de l’Otan. Ce rôle est mis en évidence par une communication consistant en un emballage idéologico-moral de l’« amitié helléno-turque », laquelle est constamment mise à mal par Ankara en mer Égée, à Chypre – pourtant état membre de l’Union européenne – dont elle occupe 38 % du territoire et de la zone économique exclusive.

Le contexte international

Le gouvernement islamique d’Ankara pense qu’il peut rétablir de deux façons cette importance perdue aux yeux de l’Occident et du système international. D’une part, en espérant se transformer en hub de transport d’hydrocarbures entre l’Europe et le Moyen-Orient, capable d’exercer une influence sur les routes énergétiques. Il espère ainsi bénéficier d’avantages en matière d’approvisionnement énergétique et conserver le soutien de l’Occident sur tous les sujets brûlants de sécurité intérieure (Kurdes, troubles sociaux anti-islamistes et antigouvernementaux). Avec ce hub, son but est aussi d’accélérer sa projection extérieure dans tout l’espace de l’ancien Empire ottoman (concept du néo-ottomanisme). Le cadre civilisationnel dominant pour atteindre ces deux objectifs stratégiques passe par le dessein géostratégique – illusoire, oppressant et dangereux pour la sécurité internationale – suivant : la création d’un axe Turquie-Balkans (ayant comme limite la mer Adriatique et la mer Ionienne), illustré par les aventures de la diplomatie turque aux côtés de l’Albanie, du Kosovo, de l’Ancienne République yougoslave de Macédoine (ARYM) et de la Bosnie[2] ; la création d’un axe Turquie-Asie centrale (avec comme tremplin principal l’Azerbaïdjan) ; la création d’un axe Turquie-Moyen-Orient (avec comme axe central le Tigre et l’Euphrate et sa prolongation avec le dipôle Gaza-Chypre, après une « turquicisation » de l’île).

Ce troisième axe suppose la création d’un État palestinien lié stratégiquement avec Ankara et l’effacement de l’influence israélienne sur la ZEE face à Gaza. De cette manière, la Turquie compte priver Israël de sa profondeur stratégique vers la Méditerranée, transformant cette dernière en un état entouré de forces islamiques. Ankara considère que la formation d’un triangle stratégique Turquie-Chypre-Palestine lui conférerait, d’une part, une influence morale dans le monde arabo-musulman et, d’autre part, lui permettrait d’exercer la position hégémonique de l’ex-URSS dans la région. De ce fait, elle escompte faire pression sur Israël et, à travers lui, forcer le gouvernement américain à lui concéder des contreparties importantes.

Des relations perturbées

Cette stratégie est illustrée notamment par la navrante attaque verbale de Erdogan à l’encontre du président Peres à Davos (le 29 janvier 2009), par le refus d’Israël de participer à l’exercice « Anatolian Eagle » (le 11 octobre 2009), par l’épisode – organisé par le gouvernement turc – du Mavi Marmara (31 mai 2010), etc.[3]

Depuis, suivirent d’autres actes anti-israéliens, voire antisémites, de la part du gouvernement d’Ankara. Ces actes ont aussi pour but d’écarter Israël de la question, d’une part, de la création d’un État kurde – ne fut-ce qu’au nord Irak – et, d’autre part, de la nouvelle distribution des gisements pétroliers de Kirkouk et de Mossoul, que la Turquie compte accaparer entièrement.

La même méthode est suivie par Ankara pour la ZEE chypriote. En affichant un soi-disant rôle d’allié – en fait inexistant – dans le front contre l’État islamique, elle envahit illégalement la ZEE de Chypre, faisant chanter de nouveau les USA et l’UE, et essaie de mettre la main sur les gisements d’hydrocarbures chypriotes. Ces gisements sont exploités par des entreprises européennes, coréennes, israéliennes et américaines. Un tel chantage ne saurait être admis ni par Jérusalem, ni par Washington, ni même par le droit communautaire ou international. En effet, céder au chantage turc n’apporterait aucune contrepartie substantielle et créerait un problème sans précédent de légalité, avec de prévisibles bouleversements et éclats à l’échelle internationale.

Ce plan turc entre en contradiction avec le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et avec les intérêts économiques et stratégiques internationaux. Il l’est également avec les besoins géostratégiques d’Israël en termes de profondeur stratégique terrestre et d’autosuffisance liée à sa sécurité et sa survie. En effet, Israël a un besoin géostratégique absolu d’un Kurdistan allié, qui ne soit pas contrôlé par des forces islamistes antisémites et qui puisse fonctionner comme rempart.

La politique intérieure turque

Pour atteindre ses objectifs, le gouvernement islamique d’Ankara a emprunté des chemins glissants en matière de politique intérieure. Après les incidents de juin 2013, la progression de l’état de droit observée en Turquie a été interrompue. Le président Erdogan a dérogé au principe de séparation des pouvoirs, contrariant en tous points les fondements d’une démocratie laïque et pluraliste de type européen. Erdogan, conscient que la Turquie avait joué le rôle d’assistant des USA, du Royaume-Uni, de la France et de l’Italie dans leur tentative de renverser le régime de Bachar al-Assad, n’a pas rencontré de fortes réactions.

Au moment où Assad a déjoué les plans occidentaux, où l’Iran dialogue avec l’Ouest de sa participation positive à la prévention d’une instabilité totale du Moyen-Orient, la Turquie continue à promouvoir son idéologie néo-ottomane en faisant usage, en sous-main, de « l’outil islamique » du soi-disant « califat ».

Il est bien connu que la Turquie entretient environ un millier de combattants au sein de l’EI et qu’elle tient un discours ambigu au regard de ses promesses aux Américains et à ses alliés occidentaux. L’exemple typique est celui de la France, vers laquelle Ankara n’hésite pas à envoyer, depuis l’EI, des djihadistes « maison » connus des services.

Les actions d’Ankara dans cette gestion de l’EI sont totalement négatives. Nombreuses sont les voix occidentales qui s’élèvent pour condamner le comportement de la Turquie dans cette affaire et penser qu’il est temps de reconsidérer sa place dans l’Otan et sa candidature à l’entrée dans l’UE. ●

[1]              L’institut Jean Lecanuet est présidé par Yves Pozzo di Borgo, sénateur de Paris. Il se donne pour mission de faire de l’espace international un espace de démocratie et de respect de l’individu, dans la fidélité aux valeurs du personnalisme communautaire. Plus particulièrement, l’institut a pour but de : étudier les courants de la mondialisation à partir de l’observation du local ; élaborer grâce à cette interaction des analyses de type prospectif et décisionnel ; associer les générations les plus jeunes au renouvellement de nos ressources politiques et à la diffusion des valeurs démocratiques ; diffuser le résultat de ces recherches et contacts dans une variété de supports (numériques, livres blancs, colloques, documentaires, etc.). L’institut est aussi un lieu de rencontre et de dialogue. Placé sous le patronage d’un grand démocrate et d’un grand Européen, qui fut aussi un résistant, un philosophe et un homme d’Etat, l’Institut se donne la mission suivante : contribuer à faire de la communauté internationale un espace proprement politique, ordonné autour d’un bien commun universel qu’il nous revient d’identifier et de servir, la démocratie. En redonnant sa dignité à l’action politique, en l’ordonnant au service de tous, en favorisant à cet effet le dialogue et la solidarité entre les peuples, les cultures et les traditions spirituelles, l’Institut entend faire preuve d’une fidélité créatrice envers les pionniers de l’action et de la pensée du personnalisme communautaire : Emmanuel Mounier, Etienne Borne, Marc Sangnier et Jean Lecanuet. L’action politique recherche toujours un équilibre entre l’adaptation aux réalités du présent et un volontarisme inspiré par la vision d’un futur différent de celui que le fatalisme et la résignation nous imposeraient. En même temps, dans le monde d’aujourd’hui, l’urgence est tout autant à la réflexion partagée qu’à l’action. Le temps de l’écoute et de la réflexion nous est donné pour susciter en nous une perception plus aiguisée du monde tel qu’il est, avec ses problèmes récurrents et ses défis nouveaux : la grande pauvreté et les risques environnementaux comme le réchauffement de la planète ou la raréfaction  des ressources naturelles ; les risques et les chances attachés à la mondialisation des échanges, du systèmes financier et des courants culturels ; les nouvelles formes prises par la violence et la résurgence des revendications identitaires ; l’émergence des communautés régionales et des autres formes politiques supranationales ; la réévaluation du rôle des anciennes et des nouvelles puissances ; la recherche d’un modèle éducatif qui réponde aux impératifs non seulement techniques mais encore éthiques et humains d’une civilisation équilibrée ; les grandes questions de santé publique mondiale telles que les pandémies. Il s’agit d’imaginer un mode de gouvernance mondiale plus efficace et équitable, de faire d’une communauté mondiale au fonctionnement encore chaotique un espace politique mondial, doté d’une conscience commune et de procédures évolutives de délibération et d’action. Les organisations internationales concourent à cette tâche. Cette dernière ne pourra progresser davantage qu’au travers d’un engagement citoyen ancré dans la mobilisation de nos ressources politiques, culturelles et spirituelles.

[2]               Voir Ahmet Davutoglu, Profondeur stratégique.

[3]               Voir de l’auteur, l’ouvrage Verba geopolitica et islamica.

FRANCE FORUM του INSTITUT JEAN LECANUET, Δεκέμβριος 2014

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